On rapporte de Léon Gontran Damas qu’il resta muet jusqu’à l’âge
de six ans, qu’il garda de son enfance un
bégaiement qui ne le quitta jamais et qu’il mourut d’un cancer de la gorge.
On rapporte aussi de lui que, pour la première fois, un poète noir
cria sa souffrance.
On dit que Damas eu trois origines, que trois sangs coulaient dans
ses veines, qu’il était créole et qu’il
était français. On dit aussi qu’il était un nègre.
On dit que Damas est un poète de renom, qu’il est un des pères
fondateurs d’un mouvement révolutionnaire à
la fois social et littéraire...
On dit parfois qu’il est un franchisseur de Lignes.
Loin de vouloir réconcilier sa figure, La Cie de l’Homme aux
Semelles de Vents et la Troupe du Méridien
ont recherché à approcher Damas au plus près de ses Lignes, à investir
les intervalles entre ses « hoquets » et faire résonner la béance entre
ses déchirements.
Elles ont voulu traduire le Damas qui s’arrache du silence par de
patientes reprises, formant peu à peu une poétique du fragment.
Fragments qui, mis bout à bout, charrient dans leurs mouvements
l’être fondamental de la négritude : celui
du cri déchirant sous une langue avalée.